DONATIENNE MILPIED – PORTRAIT

L’art de la rencontre entre soi et le monde.

A la question «Qui es-tu ?», Donatienne Milpied répond avec le calme et la simplicité de quelqu’un qui a pris le temps d’accueillir ce qu’elle est : « un être très sensible, qui appréhende et comprend les choses par le corps, plus que par la tête ». Corps fait pour le chant et la scène, cœur bouillant d’émotions, tête douée pour réfléchir, entreprendre, animer : ces trois pôles en elle ont façonné son parcours d’artiste, des chœurs de l’Opéra de Lille à la création de sa compagnie et à la direction de chœur au Conservatoire d’Angers. Ce chemin d’excellence musicale et de création scénique, accompli selon toute apparence, elle l’a longtemps vécu, dit-elle, en ignorant sa sensibilité, pour s’en protéger.

C’est pourtant par «le spontané en elle» qu’elle est entrée dans le chant. Sa voix et son charisme l’ont fait repérer très jeune dans l’univers du chant lyrique et lancé sa trajectoire de musicienne. L’opéra, «art des émotions extrêmes», était pour elle un univers familier, auquel sa mère l’avait initiée très tôt, et qui lui permettait de faire parler son propre feu intérieur.

Mais au fil de son parcours d’interprète lyrique, elle a commencé à percevoir un manque. Son corps et sa voix se déployaient, jouaient, servaient les rôles, mais en lutte l’un contre l’autre. L’intuition d’une autre voix à faire éclore l’a poussée vers la création. C’est ainsi qu’elle a fondé sa compagnie «MOts en MUsique », d’où sont nés quatre spectacles, avec le projet de «dédramatiser l’art lyrique», pour le rendre accessible à tous. Ce fut pour elle un premier pas vers la liberté de «se dire». Après quelques années à créer, administrer, promouvoir, diriger, jouer, elle a senti le besoin de se ressourcer et se recentrer.

C’est là, dans cette brèche, qu’elle a tout d’un coup laissé entrer la danse. Pressée par l’intuition que «le mouvement pouvait révéler quelque chose qui n’était pas dit», elle a suivi en 2017 un cycle complet de formation à la danse initiatique. «Il y a eu un avant et un après, dit-elle. Une rencontre avec la matière corps, avec l’être vivant que j’étais.» Ensuite il y a eu la rencontre avec le Brésil, où elle s’est expatriée 2 ans avec sa famille en 2020. Le Brésil sous cloche, en pleine pandémie, a été le lieu d’une renaissance de son art. Dans les rues vides de Recife, elle a commencé à expérimenter une forme nouvelle, «son corps dansant et chantant» au contact des sons, des couleurs et des objets de la ville. Et ce langage est devenu depuis le cœur de son chemin d’artiste. Une forme créative libre, jaillie de la rencontre «entre son espace intérieur et l’espace public», dans laquelle elle est pleinement elle-même : «femme, charnelle, dans un corps vibrant, mouvant, fragile, puissant, électrique».

Ce qui anime Donatienne Milpied aujourd’hui c’est d’accompagner d’autres, à son tour, vers «cette rencontre avec eux-mêmes», tout entiers, tête, corps et cœur, en leur apprenant à relier toutes les dimensions de leur être. En tant que coach vocal ou formatrice auprès d’équipes en entreprise, elle transmet ce qu’elle a appris : l’art de la rencontre entre soi et le monde extérieur, l’équilibre entre le désir de dire aux autres, et l’écoute de ce qui se dit en nous.

par Violaine Vignon